Le chemin de la digestion et les différents rôles de la bouche

La digestion commence bien avant que les aliments n’entrent dans votre bouche, elle débute dès que vos principaux sens perçoivent un aliment par :

• La vue : Voir un aliment appétissant active une réponse immédiate dans le cerveau, appelée la phase céphalique de la digestion. Cette étape déclenche la production de salive, de sucs gastriques et même d’enzymes digestives dans le pancréas.
• L’odorat : L’odeur d’un plat stimule également le cerveau, augmentant la production de salive et préparant le tube digestif à recevoir de la nourriture.
• L’ouïe : Des sons comme celui d’un steak qui grésille ou d’un croquant peuvent éveiller l’appétit et préparer le corps à digérer.
• Le toucher et l’imaginaire : La texture attendue ou l’anticipation du goût (par exemple, un chocolat fondant ou une pomme croquante) joue aussi un rôle dans cette préparation digestive.

Imaginez que vous voyez une tarte aux pommes dorée et sentez son parfum sucré-cannelle. Votre bouche commence immédiatement à saliver, votre estomac commence à produire de l’acide, et tout votre système digestif se met en alerte.

Ensuite l’aliment entre dans votre bouche et la salive commence son travail. En effet, la salive n’est pas qu’une réaction de « bouche qui se mouille », elle a des rôles très précis et essentiels dans le processus de digestion :

• Tout d’abord l’hydratation : Elle humidifie les aliments pour qu’ils soient faciles à avaler.
• Aussi, elle contient des enzymes digestives spécifiques et essentielles à la digestion comme :
  • L’amylase salivaire (ou ptyaline) : qui commence à décomposer les glucides complexes (comme ceux du pain ou des pâtes) en sucres plus simples.
  • La lipase linguale : qui intervient dans la digestion des graisses

Le saviez vous ? : Une bouchée bien mâchée et mélangée à la salive amorce déjà jusqu’à 30% de la digestion des glucides avant même d’arriver à l’estomac.

• Et enfin, la salive à un rôle de protection de la bouche : elle contient aussi des agents antimicrobiens qui protègent la cavité buccale des infections, tout en neutralisant les acides qui pourraient endommager les dents.

Pourquoi la mastication est si importante ?

Tout d’abord pour son action mécanique :

Quand vous mangez, vos dents jouent un rôle clé : elles découpent et broient les aliments pour les réduire en petits morceaux. Cette étape est essentielle car elle augmente la surface des aliments, facilitant le travail des enzymes digestives dans l’estomac et l’intestin. La bouche est le seul endroit de la digestion avec des dents, il n’y en a plus le long du tube digestif.

Une mastication insuffisante peut entraîner des morceaux mal digérés, ce qui surcharge l’estomac et les intestins, favorisant ballonnements et inconforts.

 

Ensuite il y a un rôle chimique : via la salive et les enzymes salivaires dont nous parlons plus haut.

La salive contient des enzymes comme l’amylase, qui commence à décomposer les glucides dès la bouche. C’est comme une « pré-digestion » qui prépare le reste du tube digestif à traiter les aliments plus efficacement.
Elle a aussi un rôle lubrifiant, en effet elle humidifie les aliments pour qu’ils passent plus facilement dans l’œsophage. Plus les aliments sons mâchés, plus ils se mélangent aux enzymes salivaires, plus le reste de la digestion sera facile et efficace.

Le saviez vous ? : Manger lentement et mâcher correctement peut doubler l’efficacité de l’amylase, ce qui aide à prévenir les pics de glycémie liés aux glucides mal digérés !

 

Enfin, il y a un rôle neurologique

La mastication envoie des signaux au cerveau pour activer davantage le processus digestif, notamment en stimulant la sécrétion d’acide gastrique et l’activité du pancréas. Les papilles gustatives détectent les saveurs (sucré, salé, acide, amer, umami) et envoient un signal au cerveau pour préparer l’organisme.
Par exemple, en détectant une saveur sucrée, le cerveau active la production d’insuline. Ce mécanisme d’anticipation est crucial pour un équilibre digestif optimal.

Une fois les aliments bien mastiqués, ils forment une boule molle qu’on appelle le bol alimentaire. Ce bol alimentaire est poussée vers l’œsophage grâce à la langue et à la salive via la déglutition. Puis ce bol alimentaire descend dans l’œsophage par des contractions musculaires rythmiques appelées péristaltisme. Ces mouvements garantissent que la nourriture arrive en douceur dans l’estomac.

Optimiser cette première phase de la digestion dans la bouche est essentiel, car une mauvaise mastication ou une faible production de salive peut avoir des répercussions tout au long du tube digestif.

Les impacts d’une « mauvaise digestion buccale »

Une mastication insuffisante :

Quand nous mangeons trop vite ou que nous ne mâchons pas assez, les aliments arrivent à l’estomac en gros morceaux. Résultat : l’estomac doit produire davantage d’acide et travailler plus dur, ce qui peut entraîner des reflux, une digestion lente, ou des ballonnements. Et si ces aliments mal digérés atteignent l’intestin, cela peut favoriser la fermentation et la production de gaz.

Imaginez que vous préparez un smoothie : Si vous mélangez des gros morceaux de fruits sans les couper correctement, la texture sera granuleuse et moins agréable à boire. C’est la même chose avec vos aliments quand vous ne mâchez pas bien : le corps ne peut pas les « traiter » efficacement.

Une salivation insuffisante :

La production de salive peut être impactée par une mauvaise hydratation, le stress, qui ralentit la salivation ou bien des habitudes comme parler ou travailler en mangeant.
Une salive insuffisante engendre moins d’enzymes digestives ce qui veut dire un début de digestion moins efficace.

Un manque de conscience en mangeant :

Lorsque nous mangeons distraitement (devant la télé ou en scrollant sur son téléphone), nous mâchons moins bien et nous ne savourons pas les aliments. Le cerveau est alors moins bien préparé à activer le reste du processus digestif, ce qui peut perturber tout le système.

Des aliments mal digérés :

Des morceaux trop gros nécessitent plus de travail dans l’estomac, ce qui peut provoquer des reflux, une digestion lente ou des ballonnements.

Une surcharge enzymatique :

Si les glucides, les protéines ou les graisses ne sont pas bien préparés dès le départ, l’intestin grêle doit compenser, ce qui peut favoriser l’inflammation et les déséquilibres de la flore intestinale.

Quelques conseils pratiques pour optimiser la digestion dès la bouche

1- Prendre le temps de manger.

Cela peut sembler bête mais de nos jours, ce n’est pas si fréquents.  Idéalement, votre repas devrait durer au moins 20 minutes. Ce qui implique de manger dans le calme, et de prendre le temps de bien mastiquer. L’astuce pour y arriver : posez vos couverts entre chaque bouchée et mâchez jusqu’à ce que la texture devienne « crémeuse ».

2 – Manger dans un état détendu.

Votre système nerveux autonome est composé de 2 branches, le système nerveux de l’action et celui de la récupération pour faire simple. Lorsque nous sommes dans l’action ce n’est pas le moment de digérer, vous devez être en mode récupération pour que la digestion se passe de façon optimale donc voici mon conseil :  Prenez 3 à 5 minutes avant chaque repas pour respirer et calmer votre système nerveux de l’action. Un corps détendu favorise une meilleure production de salive et prépare l’ensemble du système digestif.

3 – Hydratez-vous suffisamment toute la journée mais pas trop pendant les repas.

Une bonne hydratation tout au long de la journée stimule la production de salive mais par contre, si vous buvez de l’eau en trop grandes quantités pendant le repas, cela peut diluer les enzymes salivaires et gastriques donc compliquer le travail digestif.

4 – Ajoutez à chaque assiette des aliments qui stimulent la mastication

Ajoutez des aliments riches en fibres (les légumes crus ou cuits vapeurs pour plus de digestibilité) encourageant à mâcher davantage, ce qui améliore la salivation. A l’inverse, limitez les aliments trop cuits, trop mous ou encore les grands bols de soupe qui réduisent l’effort de mastication.

5 – Mangez en conscience.

Ça rejoint un peu le premier conseil qui est de prendre le temps de manger. Prenez le temps d’apprécier les saveurs, les textures et les odeurs de vos aliments et évitez de manger devant la télé, l’ordinateur ou le téléphone.

Astuce simple: Essayez de mastiquer chaque bouchée 20 à 30 fois avant d’avaler. Cela peut sembler long au début, mais cela devient vite une habitude bénéfique!

 

Le lien entre la bouche et la santé globale

Tout d’abord il y a un lien entre la santé buccale et la flore intestinale. Une mauvaise hygiène buccale (caries, gingivites, plaque dentaire) peut entraîner la prolifération de mauvaises bactéries. Des bactéries qui peuvent descendre dans le tube digestif et perturber l’équilibre de la flore intestinale, aggravant les troubles digestifs.

 

Ensuite il existe un lien entre mastication et satiété. Une mastication lente envoie des signaux au cerveau pour indiquer que vous êtes rassasié. Cela peut aider à éviter les excès alimentaires, qui surchargent le système digestif. A l’inverse si vous mangez très vite, vous aurez besoin de plus manger, le temps que le signal de satiété soit envoyé au cerveau, donc risque de surconsommation et de surpoids à force.

 

Et enfin, le lien entre le stress chronique et la bouche sèche. Le stress chronique peut réduire la production de salive, augmentant le risque de troubles digestifs. Intégrer des pratiques comme la respiration ou le yoga peut aider à briser ce cercle vicieux.

 

Prendre conscience de tout cela et de cette première étape de digestion qui commence dans la bouche et non pas dans l’estomac, est un moyen puissant d’améliorer votre digestion et, plus largement, votre santé.

Alors, je vous mets au défi : A partir de votre prochain repas, prenez le temps de mâcher, d’apprécier chaque bouchée, et de savourer l’expérience. Votre digestion vous remerciera !